à la recherche d’un impact bonifiant par la présence de l’être humain
Article écrit par Ludmilla Mary Martin
Présentation et aspect urbanistique
Présentation des Kerterres et de leur créatrice
Selon la définition donnée par l’entreprise Kerterre, « la Kerterre est un habitat rond, proche de la nature, façonné à la main avec des matériaux naturels ». Le mot « Kerterre » a été inventé à la fin des années 1990 par leur créatrice, Evelyne Adam.
En breton, « ker » signifie « maison » / « chez » et donc « chez la Terre ». La durée de vie d’une Kerterre serait de 1000 ans.
Aujourd’hui, Kerterre est devenue une petite entreprise située dans le Finistère sud. Son but est de transmettre cette technique de construction sous la forme de stages et de visites du lieu.
A l’origine de sa création, l’idée était de vivre autrement sur la planète. Evelyne Adam a eu l’idée de la structure de la Kerterre en pensant à l’igloo, l’habitat le plus chaud dans les pays les plus froids. L’objectif était ainsi de créer un habitat qui demande moins à la planète et qui a un impact bonifiant autour de lui : la présence humaine peut-elle profiter à son environnement plutôt que le dégrader ?
L’entreprise a depuis créé le label’’ bonifiant” afin de s’engager davantage dans cette voie.

L’aspect urbanistique
En ce qui concerne les règles d’urbanisme pour les Kerterres, deux paliers de superficie sont importants : 5m2 et 20m2.
– En dessous de 5m2, aucune démarche n’est nécessaire.
– Entre 5 et 20 m2, une déclaration de travaux uniquement est à faire.
– Au-delà de 20m2, il faudra demander un permis de construire (certains ont été obtenus en France récemment).
La Kerterre est classée dans la catégorie des habitats légers. De ce fait, elle peut être construite sur un terrain non constructible classé STECAL (Secteur de Taille et de Capacité d’Accueil Limitées¹ ) ou “zone pastille” dans le PLU.

¹Les zones agricoles, naturelles et forestières sont en principe inconstructibles ou alors la constructibilité doit rester très limitée. Dans ces zones peuvent ainsi être délimités des STECAL à titre exceptionnel où la construction peut être autorisée si elle ne porte pas atteinte à la préservation des sols agricoles et sylvicoles et à la sauvegarde des espaces naturels.
Source : Charte d’agriculture et d’urbanisme de Sarthe
La technique de construction et le rapport à la Terre
Technique de construction et matériaux utilisés
La Kerterre est un habitat sans ossature. Sa forme ronde, fermée par une clé de voûte, permet de répartir les forces. Il s’agit véritablement d’une technique à la croisée de la sculpture et de l’architecture.

Les murs de la Kerterre sont posés sur un soubassement de pierres. Le chanvre est trempé dans de la chaux et du sable, ce à quoi il faut ajouter un peu d’eau afin d’obtenir une pâte. Ce sont les mèches de chanvre trempées dans la chaux qui, en se superposant et s’entremêlant, créent un mur fibré et autoportant.
Contrairement au bois utilisé classiquement pour la construction où les arbres abattus ont une trentaine d’années, ceux utilisés pour obtenir le chanvre sont âgés d’un an seulement. Les portes des Kerterre sont façonnées avec le bois mort, trouvé sur place.

Le chanvre est un matériau de construction biosourcé qui peut ainsi stocker du carbone et qu’il est possible de trouver à proximité du lieu de construction.
Tout comme la chaux (matériau géosourcé obtenu via la calcination d’un calcaire), c’est un matériau respirant. Quatre aérations hautes et quatre aérations basses sont également ajoutées.
Nous pouvons évoquer ici que le mélange chaux-chanvre est l’un des enduits de correction thermique les plus connus, notamment utilisé dans la rénovation des maisons anciennes. Il s’agit également d’un correcteur phonique efficace. Selon le site de l’atelier Chevillotte basé à Cluny (Saône-et-Loire) et concernant le bilan carbone, le chanvre annule le bilan carbone de la chaux.



Pour une Kerterre « basique » (3m de diamètre), le coût des matériaux (pierres, chaux, chanvre et sable) est d’environ 1000 euros. Il faut ajouter à cela le prix des fenêtres, du dôme et de la porte.
Le rapport au sol et à la Terre
La Kerterre permet de dormir et de vivre au plus près de la Terre. Le sol est donc le plus souvent un tapis végétal sous lequel il est possible de poser des billes d’argile ou de liège. Le sol reste ainsi vivant, perméable et la Kerterre minimise au maximum son impact sur le lieu d’implantation.
Il existe aussi des Kerterre avec du parquet ou du carrelage, même si cela s’éloigne de l’esprit originel.


La façon d’habiter et la possibilité du collectif
La façon d’habiter une Kerterre
Au sein des Kerterres il n’y a donc pas d’électricité ou d’eau courante. Nous pouvons imaginer un réservoir d’eau de pluie relié par un tuyau et une petite pompe à un point d’eau à l’intérieur de la Kerterre. Si tous les produits utilisés sont d’origine naturelle, comme la cendre par exemple, il peut être possible de les rejeter dans la nature. Sinon, un bac peut venir stocker les eaux grises qui seraient emmenées pour être traitées. Les toilettes sont des toilettes sèches.
Un poêle peut permettre de chauffer la maison.
Le confort est ainsi basique, c’est un habitat très simple dans son essence pour lequel il faut être prêt à renoncer à une partie de son confort matériel.


Et le collectif, dans tout ça ?
Ce sont des micro-habitats, souvent conçus pour une ou deux personnes mais l’agrandissement est aisé car il s’agit simplement de construire une nouvelle Kerterre, accolée ou non selon ses envies.
Nous pourrions aussi facilement imaginer une Kerterre au sein d’un éco-lieu, entourée d’autres habitats légers, d’un potager et de services partagés entre habitants.
Les Kerterres permettraient-elles ainsi, en offrant une “bonification” à leur environnement grâce à la présence de l’être humain, de renverser la relation classique, déséquilibrée et unilatérale entre l’Homme et son territoire d’implantation?
Sources :
-le site de l’entreprise Kerterre : https://kerterre.org
-le site du ministère de la transition écologique :
https://www.ecologie.gouv.fr/materiaux-construction-biosources-et-geosources
-la Charte d’agriculture et d’urbanisme de Sarthe :
http://www.sarthe.gouv.fr/IMG/pdf/fiche_13_stecal.pdf
-les enduits de correction thermique : chaux et chanvre assimilés — site de l’atelier chevillotte
https://www.atelier-chevillotte.fr/enduit-chanvre-186483.htm
Ravie de redécouvrir ce mode d’habitat si simple, en forte incorporation avec son environnement et accessible.
Intéressé par l’idée d’en ériger à mon tour, sauriez vous répondre à mes quelques questions ?
Lorsque plusieurs Kerterres sont reliées les une aux autres, quelles sont les règles d’urbanisme en vigueur concernant la superficie ainsi obtenue ? ( Somme de 5m² ou bien règles des +/- 20m² ?)
Quels sont les règles et limites approximatives de maintien stable d’une Kerterre selon sa hauteur ? (Peut facilement atteindre des proportions digne d’un étage/palier par exemple ?)
Très heureuse que les Kerterres vous plaisent !
Concernant la première question : je pense que c’est toujours la même règle qui s’applique. La question sera de savoir si vous êtes amenés à dépasser 5m2 ou 20m2 au total de surface construite au sol. Si vous avez déjà une kerterre de moins de 5m2 et que vous en ajoutez une, accolée de moins de 5m2 également, il faudra sûrement à ce moment faire une déclaration de travaux.
Concernant la seconde question, je n’ai jamais vu de kerterre avec un étage et je ne pense pas que cela soit réellement dans l’esprit de création des Kerterres, inspirées au départ des igloos… Toutefois cela reste possible de contacter l’entreprise Kerterre ou de leur poser la question lors d’une visite ou d’u stage sur le lieu ! Je suis sûre qu’ils seront ravis d’y répondre 🙂
Wonderful views on that!